Le Roi s’ennuie, La Reine s’ennuie : deux titres hugoliens, ou plutôt deux titres provisoirement envisagés par Hugo, l’un pour un drame (Le Roi s’amuse), l’autre pour un acte d’un drame, le deuxième acte de Ruy Blas, que l’auteur a préféré plus sobrement intituler « La Reine d’Espagne ». Dans ses Odes et Ballades, Hugo peignait déjà un « maître de la terre » qui, pour « charmer son ennui profond et solitaire », s’adonne à des amusements redoutables : Néron embrasant Rome. Récurrent dans l’œuvre hugolienne, le motif de l’ennui princier affleure chez nombre de ses contemporains. Quelle est, d’après le Dumas des Trois Mousquetaires, « la pire maladie » de Louis XIII, sinon l’ennui ?

 

M. de Tréville était entré hardiment dans le cabinet du roi, et avait trouvé Sa Majesté de très méchante humeur, assise sur un fauteuil et battant ses bottes du manche de son fouet, ce qui ne l’avait pas empêché de lui demander avec le plus grand flegme des nouvelles de sa santé.

- « Mauvaise, monsieur, mauvaise, répondit le roi, je m’ennuie. »

C’était, en effet, la pire maladie de Louis XIII, qui souvent prenait un de ses courtisans, l’attirait à une fenêtre et lui disait : « Monsieur un tel, ennuyons-nous ensemble ». (Dumas, Les Trois Mousquetaires, chap. VI)

 

En dehors de l’époque romantique, où il fut particulièrement goûté, le thème de l’ennui royal a inspiré des auteurs de tous siècles, qu’il s’agisse d’un ennui au masculin ou au féminin, d’un intense taedium vitae ou d’une banale contrariété, et que le remède – si tant est qu’il existe – soit l’amour, le jeu ou le crime.

            Qu’un être tout-puissant se morfonde, voilà qui pourrait passer pour un paradoxe. Le prince de Parme, chez Stendhal, s’étonne ainsi d’être exposé à l’ennui malgré les privilèges dont il jouit : « d’autres s’amusaient, et lui, prince souverain, maître absolu, qui devait s’amuser plus que personne au monde, il connaissait l’ennui ! » (La Chartreuse de Parme, chap. 6). Chez Shakespeare déjà, au Prince Henry déplorant son ennui, Poins répondait : « je n’aurais jamais cru que la lassitude osât s’attacher à un personnage de si haut rang » (Henry IV, II.2)[1]. Or, l’ennui n’épargne pas les grands de ce monde. Dans le portrait le plus célèbre d’un roi ennuyé, le fragment de Pascal consacré au « roi sans divertissement », l’ennui royal vaut comme exemple a fortiori de l’universel besoin de divertissement : même le souverain, être comblé par le sort, est menacé par l’ennui. Mais ne pourrait-on pas soutenir, bien plus, qu’il y a une vulnérabilité spécifique du roi à l’ennui ? C’est en ce sens que Sartre risque l’expression « s’ennuyer comme un roi » (Les Mots, Gallimard, 1964, p. 78). Nombre d’écrivains ont montré que le monarque tend à être davantage soumis que quiconque à l’ennui, tant le pouvoir qu’il a de satisfaire ses désirs l’expose à ne plus goûter aucune joie.

      Cette corrélation entre toute-puissance et ennui, Hugo l’exprime parfaitement, dans La Légende des Siècles cette fois, à propos du sultan Zim-Zimimi : « il a tout ; c’est pourquoi ce tout-puissant s’ennuie » (v. 72). C’est dès lors chez le roi que l’on rencontrerait l’ennui sous sa forme superlative. Redéfinissant les rapports entre désir et manque (il n’est pire privation que celle du « plaisir de désirer »), Rousseau écrit dans une note de La Nouvelle Héloïse (VI. 8) : « d’où il suit que tout Prince qui aspire au despotisme aspire à mourir d’ennui. Dans tous les royaumes du monde cherchez-vous l’homme le plus ennuyé du pays ? Allez toujours directement au souverain ». L’expression « mourir d’ennui » va de fait jusqu’à trouver une application quasi-littérale chez des rois terrassés par un ennui extrême. Ainsi le « roi d’un pays pluvieux » imaginé par Baudelaire est-il un être désincarné, anéanti, déjà aux portes de la mort. Quintessence de l’ennui, ennui dévastateur pour celui qui l’éprouve et pour ceux – sujets, entourage – qui en font les frais, tel serait l’ennui royal. Si ce canevas a autant nourri l’imaginaire des écrivains, n’est-ce pas parce qu’il permet par excellence d’explorer les périlleux jeux du pouvoir et du désir ?

            Modèle pascalien, modèle néronien (le roi qui tue par désœuvrement), modèle féérique (la princesse ou le prince de conte de fées qui se languit), modèle shéhérazadien (le prince d’Orient que seule la fiction distrait) : c’est à un ou plusieurs de ces paradigmes que se rattachent les souverains mis en scène dans les textes que nous étudierons. Ennui est de ces mots qui ont connu un net affaiblissement sémantique : évoquant originellement « un accablement », une « profonde douleur » (TLF), il en vient à désigner un simple sentiment de lassitude. Aussi procèderons-nous en decrescendo : c’est d’abord l’ennui métaphysique, le terrifiant goût du néant, que nous considèrerons, avant d’évoquer des formes moins tragiques d’ennui, et de commenter, en conclusion, quelques variations parodiques sur le motif de l’ennui royal.

 

 

*

 

            Comment ne pas ouvrir cette étude avec le texte (ou plutôt, l’un des deux textes [2]) des Pensées où Pascal médite sur la misère du roi sans divertissement ?

 

La dignité royale n’est‑elle pas assez grande d’elle-même, pour celui qui la possède, pour le rendre heureux par la seule vue de ce qu’il est ? Faudra‑t‑il le divertir de cette pensée comme les gens du commun ? Je vois bien que c’est rendre un homme heureux de le divertir de la vue de ses misères domestiques pour remplir toute sa pensée du soin de bien danser, mais en sera‑t‑il de même d’un roi, et sera‑t‑il plus heureux en s’attachant à ses vains amusements qu’à la vue de sa grandeur, et quel objet plus satisfaisant pourrait‑on donner à son esprit ? Ne serait‑ce donc pas faire tort à sa joie d’occuper son âme à penser à ajuster ses pas à la cadence d’un air ou à placer adroitement une barre, au lieu de le laisser jouir en repos de la contemplation de la gloire majestueuse qui l’environne ? Qu’on en fasse l’épreuve. Qu’on laisse un roi tout seul sans aucune satisfaction des sens, sans aucun soin dans l’esprit, sans compagnies, penser à lui tout à loisir, et l’on verra qu’un roi sans divertissement est un homme plein de misères. Aussi on évite cela soigneusement et il ne manque jamais d’y avoir auprès des personnes des rois un grand nombre de gens qui veillent à faire succéder le divertissement à leurs affaires, et qui observent tout le temps de leur loisir pour leur fournir des plaisirs et des jeux, en sorte qu’il n’y ait point de vide. C’est‑à-dire qu’ils sont environnés de personnes qui ont un soin merveilleux de prendre garde que le roi ne soit seul et en état de penser à soi, sachant bien qu’il sera misérable, tout roi qu’il est, s’il y pense.

Je ne parle point en tout cela des rois chrétiens comme chrétiens, mais seulement comme rois.

(Pascal, Pensées, Sellier 169)

 

De ce fragment célèbre entre tous, il faut souligner la teneur expérimentale. Il s’agit pour Pascal d’énoncer une hypothèse conforme à la doxa – le privilège prétendu qu’aurait le roi de pouvoir se dispenser de divertissement – puis de l’infirmer à partir d’une « épreuve », d’une expérience de pensée dont le protocole est décrit avec soin (« qu’on laisse un roi... », injonction éminemment pascalienne[3]). Pascal a fait, en physicien, des expériences sur le vide ; il fait ici, en moraliste, une expérience sur le vide existentiel. La conclusion est formulée de façon saisissante : « un roi sans divertissement est un homme plein de misères » ; rythmiquement harmonieuse (deux octosyllabes), cette phrase fait succéder au vide (sans) un plein (mais douloureux), et, surtout, le roi est ravalé au rang de simple homme, ayant besoin du divertissement « comme les gens du commun ». Si pour Pascal, tout homme est à sa façon un « roi dépossédé »[4], en retour, le roi ne s’abstrait pas de l’humaine condition : « les grands et les petits ont mêmes accidents et mêmes fâcheries, et même passion » (Sel. 583).

            La phrase « un roi sans divertissement est un homme plein de misère » a inspiré à Giono le titre et la conclusion de son premier grand roman d’après-guerre : Un roi sans divertissement (1947). Pour être symbolique, la royauté n’en est pas moins un motif structurant du texte de Giono, comme l’a souligné Philippe Arnaud dans un récent article sur les « Figures de la royauté dans Un roi sans divertissement » [5]. Interrogé sur Langlois, le héros du roman, Giono dit dans un entretien : « il est un roi, c’est un héros, il a distribué la justice, comme les rois »[6]. Langlois est un roi qui se morfond, assez pour être progressivement attiré par le crime, jusqu’au magistral finale où il se donne la mort et sa tête « prend, enfin, les proportions de l’univers ». Il n’est pas anodin qu’un autre personnage du roman en quête de divertissement ait un nom royal parodique : Frédéric II. Saucisse ne dit-elle pas, en une expression remotivée, qu’elle n’a pas « fait cuire les perdrix pour le roi de Prusse » ? L’ennui royal affleure du reste dans d’autres romans de Giono : « l’âme forte » gionienne, qui « jouit de la libre pratique de la souveraineté » (Les Âmes Fortes, Folio, p. 350), est un être d’élite – Thérèse déclare : « enceinte et abandonnée, j’étais la reine du monde » (p. 319) – qui aspire, en se « satisfaisant d’illusions », à « sortir de l’ennui » (p. 311).

            Il est d’autres portraits de « rois sans divertissement » où l’on devine des souvenirs pascaliens, fussent-ils moins explicites et prégnants. Voltaire, adversaire déclaré de Pascal (à qui il adresse une série d’objections dans le célèbre « petit anti-Pascal » sur lequel se concluent les Lettres Philosophiques), mais admirateur de celui qu’il baptisa « le misanthrope sublime », n’est pas sans rejoindre l’analyse pascalienne du « roi sans divertissement » dans une de ses Épîtres :


[...] Souvent même un grand roi s’étonne,
Entouré de sujets soumis,
Que tout l’éclat de sa couronne
Jamais en secret ne lui donne
Ce bonheur qu’il s’était promis ;
On croirait que le jeu console,
Mais l’ennui vient à pas comptés
A la table d’un cavagnole
S’asseoir entre deux majestés ;
On fait tristement grande chère
Sans dire et sans écouter rien
Tandis que l’hébété vulgaire
Vous assiège, vous considère
Et croit voir le souverain bien [...]. (Voltaire, « Épître à Madame la Dauphine », 1748)

Les derniers vers gagnent à être lus conjointement à un autre texte de Voltaire, le premier des Discours sur l’homme, où l’auteur, prenant le revers de l’expression « heureux comme un roi » (lexicalisée au XVIIIe siècle), se répand en considérations lénifiantes – et topiques – sur l’incommodité de la grandeur : s’il est vrai que les puissants ne sont pas plus heureux que le commun des hommes, pourquoi contester un ordre social inégalitaire ?

 

Un jeune colonel a souvent l'impudence

De passer en plaisirs un maréchal de France.

« Être heureux comme un roi », dit le peuple hébété

Hélas ! pour le bonheur que fait la majesté?

En vain sur ses grandeurs un monarque s'appuie

Il gémit quelquefois, et bien souvent s'ennuie.

 

            Au siècle suivant, le troisième « Spleen » de Baudelaire, ample comparaison entre le je lyrique et « le roi d’un pays pluvieux », peut rappeler le fragment de Pascal. Si le recours à la comparaison est structurant dans deux autres des « Spleen » (avec l’identification entre le cerveau et le caveau, et l’image du ciel qui pèse « comme un couvercle »), le troisième « Spleen » est le seul des quatre poèmes où une comparaison unique s’étend sur tout le poème. Un déséquilibre frappant s’établit toutefois entre le comparé et le comparant : rien n’est dit sur le je si ce n’est à partir de son alter ego, le « roi d’un pays pluvieux ». Le poème s’ouvre sur une première personne, mais qui s’efface ensuite définitivement. Tout le texte repose en somme sur une logique d’abdication de soi : le je, en vertu d’un sinistre redoublement, disparaît derrière un être qui lui-même renonce à la vie et à soi.

 

Je suis comme le roi d'un pays pluvieux, (v. 1)
Riche, mais impuissant, jeune et pourtant très vieux,
Qui, de ses précepteurs méprisant les courbettes,
S'ennuie avec ses chiens comme avec d'autres bêtes.
Rien ne peut l'égayer, ni gibier, ni faucon, (v. 5)
Ni son peuple mourant en face du balcon.
Du bouffon favori la grotesque ballade
Ne distrait plus le front de ce cruel malade ;
Son lit fleurdelisé se transforme en tombeau,
Et les dames d'atour, pour qui tout prince est beau, (v. 10)
Ne savent plus trouver d'impudique toilette
Pour tirer un souris de ce jeune squelette.
Le savant qui lui fait de l'or n'a jamais pu
De son être extirper l'élément corrompu,
Et dans ces bains de sang qui des Romains nous viennent,
Et dont sur leurs vieux jours les puissants se souviennent, (v. 15)
Il n'a su réchauffer ce cadavre hébété
Où coule au lieu de sang l'eau verte du Léthé.

 

À certains égards, la situation du roi baudelairien est plus tragique que celle du « roi sans divertissement » pascalien. En effet, les courtisanes, les occupations politiques, le bouffon et les flatteurs – qui procurent des distractions correspondant à ce que l’auteur des Pensées nomme la « satisfaction des sens », le « soin de l’esprit » et « la compagnie » – ne sont pas dans « Spleen » retirés au roi, ils sont tout bonnement dépourvus d’effet sur lui. Baudelaire ne met pas en scène la misère d’un roi privé de divertissement, mais la misère d’un roi incapable de tirer parti des divertissements qui lui sont offerts. Le « roi d’un pays pluvieux » (la pluie est une image lugubre commune à trois des quatre « Spleen ») est habité par un « goût du néant » si profond qu’aucune distraction ne peut l’en délivrer. La chasse, paradigme du divertissement chez Pascal, ne procure ainsi aucun délassement. Quant au bouffon, traditionnel virtuose du divertissement, il n’arrive pas davantage à dérider le Prince. Enfin, la libido sentiendi (la « toilette impudique » des dames) n’a guère plus d’effet que la libido dominandi. Rien ne peut empêcher le roi de s'ennuyer, et le mot, sur lequel s’ouvre le quatrième vers, est à comprendre dans son sens le plus intense : il s’agit d’un Ennui hyperbolique, qui « dans un bâillement avalerait le monde » (« Au lecteur »).

         Un tel ennui plonge dans une torpeur qui ressemble à l’inertie d’un mort. Le poème s’impose en effet progressivement comme le portrait d’un défunt. Le mot tombeau figure d’abord à la rime (v. 9), puis l’oxymore « ce jeune squelette » accentue le paradoxe déjà énoncé au v. 2 (« jeune et pourtant très vieux »). L’impossibilité de « tirer un sourire » du squelette inverse l’image conventionnelle de la tête de mort figée dans un sourire macabre (« les dents sont nécessaires au rire. La tête de mort les garde », écrit Hugo dans L’Homme qui rit). Même mort, le prince compte parmi « ceux qui ne peuvent plus sourire » (« L’Heautontimorouménos »). Dans les derniers vers, le sang qui coule dans les veines du roi est comparé au Léthé, fleuve de l’oubli certes (le tourment ne serait plus l’encombrement de la mémoire, comme dans « Spleen II », mais la disparition des souvenirs) mais surtout fleuve des morts : Baudelaire parle de « sommeil aussi doux que la mort » dans son poème intitulé « Le Léthé ». Bachelard, dans L’Eau et les rêves, a analysé, sous le nom de « complexe de Charon », la rêverie mortuaire liée aux fleuves infernaux. Le sang, source de vie, est ici transformé en une eau sombre qui charrie la mort, en vertu d’une  alchimie de la douleur inverse de celle du savant changeant les matériaux vils en or (v. 13). C’est ainsi par un effet de gradation que Baudelaire approfondit le paradoxe d’un homme étranger à l’ici-bas où il est censé régner. 

            L’image du cadavre que rien ne peut « réchauffer » (avant-dernier vers) est l’un des nombreux échos, dans le texte de Baudelaire, d’un poème de Gautier de peu antérieur, où l’accent était toutefois mis – en conformité avec le titre – sur le motif de la solitude :

 

Le Roi Solitaire

 

Je vis cloîtré dans mon âme profonde, 
Sans rien d'humain, sans amour, sans amis, 
Seul comme un dieu, n'ayant d'égaux au monde 
Que mes aïeux sous la tombe endormis ! 
Hélas ! grandeur veut dire solitude. 
Comme une idole au geste surhumain, 
Je reste là, gardant mon attitude, 
La pourpre au dos, le monde dans la main. 

Comme Jésus, j'ai le cercle d'épines ; 
Les rayons d'or du nimbe sidéral 
Percent ma peau comme des javelines, 
Et sur mon front perle mon sang royal. 
Le bec pointu du vautour héraldique 
Fouille mon flanc en proie aux noirs soucis : 
Sur son rocher, le Prométhée antique 
N'était qu'un roi sur son fauteuil assis. 

De mon olympe entouré de mystère, 
Je n'entends rien que la voix des flatteurs ; 
C'est le seul bruit qui des bruits de la terre 
Puisse arriver à de telles hauteurs ; 
Et si parfois mon peuple, qu'on outrage, 
En gémissant entrechoque ses fers : 
« Sire ! dormez, me dit-on, c’est l’orage ; 
Les cieux bientôt vont devenir plus clairs. » 

Je puis tout faire, et je n’ai plus d’envie. 
Ah ! si j’avais seulement un désir ! 
Si je sentais la chaleur de la vie ! 
Si je pouvais partager un plaisir ! 
Mais le soleil va toujours sans cortège ; 
Les plus hauts monts sont aussi les plus froids ; 
Et nul été ne peut fondre la neige 
Sur les sierras et dans le cœur des rois !

 

La neige comme métaphore d’un insupportable ennui : cette image, filée dans les trois derniers vers, est ébauchée dans le deuxième « Spleen » (voir ici quelques réflexions à ce sujet), mais non dans le troisième. Chez Gautier comme chez Baudelaire, la flagornerie qui domine à la Cour est peinte avec sarcasme : les mensonges éhontés des courtisans sont dans « Le Roi solitaire » rapportés au discours direct, et, chez Baudelaire, la rime courbette / bête est railleuse, de même que l’hémistiche « pour qui tout prince est beau ». La portée du poème de Baudelaire est existentielle bien davantage que politique, mais on relève combien l’indifférence du Prince a pour corollaire une odieuse insensibilité. La mention des « bains de sang » remotive étymologiquement l’adjectif cruel du v. 8 et surtout, le v. 6, « ni son peuple mourant en face du balcon », en suggérant une équivalence entre loisirs nobiliaires (« ni gibier, ni faucon ») et souffrance du peuple, témoigne du plaisir sadique à l’œuvre chez le Prince, pour qui le spectacle de la misère pourrait constituer un motif d’« égaiement ». Ce vers crée fugitivement un contraste entre la misère existentielle du Prince et la misère sociale du peuple affamé.

            La figure du prince ennuyé hante assez Baudelaire pour qu’il lui consacre deux de ses poèmes. Le Prince d’« Une Mort Héroïque » (le plus long des poèmes du Spleen de Paris) est en effet un double du « roi d’un pays pluvieux ». Selon un renversement significatif, il s’agit toutefois non cette fois pour le poète de se peindre sous les traits du Prince mais de s’identifier à l’artiste exceptionnel qu’est le bouffon Fancioulle. Tel est, au début du poème, le portrait ambivalent du Prince :

 

Je croirais volontiers que le Prince fut presque fâché de trouver son comédien favori parmi les rebelles. Le Prince n’était ni meilleur ni pire qu’un autre ; mais une excessive sensibilité le rendait, en beaucoup de cas, plus cruel et plus despote que tous ses pareils. Amoureux passionné des beaux-arts, excellent connaisseur d’ailleurs, il était vraiment insatiable de voluptés. Assez indifférent relativement aux hommes et à la morale, véritable artiste lui-même, il ne connaissait d’ennemi dangereux que l’Ennui, et les efforts bizarres qu’il faisait pour fuir ou pour vaincre ce tyran du monde lui auraient certainement attiré, de la part d’un historien sévère, l’épithète de « monstre », s’il avait été permis, dans ses domaines, d’écrire quoi que ce fût qui ne tendît pas uniquement au plaisir ou à l’étonnement, qui est une des formes les plus délicates du plaisir. Le grand malheur de ce Prince fut qu’il n’eut jamais un théâtre assez vaste pour son génie. Il y a de jeunes Nérons qui étouffent dans des limites trop étroites, et dont les siècles à venir ignoreront toujours le nom et la bonne volonté. L’imprévoyante Providence avait donné à celui-ci des facultés plus grandes que ses États.

 

L’Ennui, allégorisé par la majuscule, est le « tyran du monde », le puissant qui règne sur les puissants. On songe au poème liminaire des Fleurs du Mal, « Au lecteur », où l’Ennui est décrit sous les traits d’un despote oriental. Pour triompher de lui, le Prince, esthète cruel – et, à en croire ces lignes, cruel parce qu’esthète – est prêt à tous les « efforts bizarres », et Fancioulle, victime de « l’homicide efficacité » d’une ruse, en fera les frais.

            « Il y a de jeunes Nérons qui étouffent dans des limites trop étroites » : cette phrase invite à des rapprochements entre « Une Mort héroïque » et d’autres figures de Princes ennuyés. 1) Les considérations sur l’insupportable exiguïté du royaume, tout d’abord, rappellent de près le Ranuce-Ernest de La Chartreuse de Parme. Le souverain de Parme, bercé par de cocasses rêves louis-quatorziens, souffre de ne gouverner qu’une minuscule principauté – une « capitalette » selon le mot de Balzac dans son étude sur La Chartreuse. Il n’est pire façon de l’humilier que de lui rappeler que Parme n’est qu’une « petite ville » (Pléiade, 1952, p. 248) incapable de rivaliser avec d’opulentes cités comme Naples et Milan. Dans cette Cour étriquée, il éprouve un ennui qui, comme chez Baudelaire, alimente la perversité : ainsi est-ce « dans un moment d’ennui et de colère » (ibid., p. 126) que Ranuce-Ernest, las de tout et craintif au suprême degré, ordonne des exécutions massives. 2) Que Baudelaire cite Néron en antonomase est par ailleurs révélateur, tant le modèle néronien – celui du tyran prêt, pour se divertir, à incendier la cité – transparaît derrière bien des rois ennuyés. Hugo n’écrivait-il pas dans William Shakespeare que « Néron est la plus formidable figure de l’ennui qui ait jamais paru parmi les hommes » ? Dès son premier recueil, les Odes et Ballades, Hugo peignait l’ennui destructeur du cinquième empereur romain :

 

Venez, Rome à vos yeux va brûler, — Rome entière !
J’ai fait sur cette tour apporter ma litière
Pour contempler la flamme en bravant ses torrents.
Que sont les vains combats des tigres et de l’homme ?
Les sept monts aujourd’hui sont un grand cirque, où Rome
Lutte avec les feux dévorants.

C’est ainsi qu’il convient au maître de la terre
De charmer son ennui profond et solitaire !
Il doit lancer parfois la foudre, comme un dieu !
Mais, venez, la nuit tombe et la fête commence.
Déjà l’Incendie, hydre immense,
Lève son aile sombre et ses langues de feu 

(Hugo, « Un chant de fête de Néron »)

 

« Honte à qui peut chanter pendant que Rome brûle / S’il n’a l’âme et la lyre et les yeux de Néron », écrira quelques années plus tard Lamartine en des vers fameux. Ce sur quoi Hugo insiste, c’est l’odieuse conversion d’un malheur collectif en spectacle solitaire. Rome n’est plus qu’un « grand cirque » pour Néron, qui apprécie esthétiquement la lutte de la ville contre les flammes comme il se délecterait d’un combat de fauves.

            Des Grands prêts à tout pour « charmer leur ennui », Hugo en a campés dans nombre de ses œuvres : François Ier dans Le Roi s’amuse, mais aussi, dans L’Homme qui rit, la duchesse Josiane, tentatrice qui attire à elle Gwynplaine :

 

- « J’aurais cru que cela m’ôterait mon ennui. Eh bien, non. »

Lord David s’arrêta, regarda Josiane, ferma la bouche et enfla les joues en secouant la tête, ce qui signifie : attention ! Et dit à la duchesse :

« Pour l’ennui, il n’y a qu’un remède.

- Lequel ?

- Gwynplaine. »

La duchesse demanda :

« Qu’est-ce que c’est que Gwynplaine ? »

(L’Homme qui rit, Folio Classique, p. 347)

 

Mais si Hugo a peint l’ennui au féminin, c’est surtout dans Ruy Blas : dans la préface, il écrit que la Reine incarne « la vertu minée par l’ennui ». Tenue enfermée, soumise à une étiquette rigide, délaissée par son mari, la Reine a une existence qui n’est qu’un « tissu d’ennuis » (I. 3). Comment ne serait-elle pas sensible aux lettres enflammées de Ruy Blas, quand le mufle Roi ne sait pour sa part que parler chasse, comme dans le savoureux épisode où la Reine reçoit de lui une missive fort peu passionnée (II. 3) ?

 

LA REINE : D’où me vient cette lettre ?

LA DUCHESSE : Madame,

D’Aranjuez, où le roi chasse.

LA REINE : Du fond de l’âme

Je lui rends grâce. Il a compris qu’en mon ennui,

J’avais besoin d’un mot d’amour qui vînt de lui !

Mais donnez donc.

LA DUCHESSE, avec une révérence, montrant la lettre. L’usage, il faut que je le dise,

est que ce soit d’abord moi qui l’ouvre et la lise.

LA REINE : Encore ! — Eh bien, lisez !

La duchesse prend la lettre et la déplie lentement.

CASILDA, à part : Voyons le billet doux.

LA DUCHESSE, lisant : « Madame, il fait grand vent et j’ai tué six loups.

Signé, Carlos. »

 

            Commentateurs et metteurs en scène ont parfois relevé des liens entre le canevas de Ruy Blas – un séduisant valet s’éprend d’une reine malheureuse – et le genre du conte de fée. De fait, la figure de la princesse rongée par l’ennui est topique dans les contes. On ne compte pas les princesses captives qui se morfondent dans la tour où elles sont séquestrées, comme dans La Princesse Rosette de Marie-Catherine d’Aulnoy (1697) :

 

Le roi et son frère décidèrent : « A présent que nous sommes les maîtres, il faut retirer notre sœur de la tour où elle s'ennuie depuis longtemps. » Ils n'eurent qu'à traverser le jardin pour aller à la tour, qu'on avait bâtie la plus haute que l'on avait pu car le roi et la reine défunts voulaient qu'elle y demeurât toujours.
Rosette brodait une belle robe sur un métier qui était là devant elle ; mais quand elle vit ses frères, elle se leva et prit la main du roi, lui disant :
« Bonjour, sire ! Vous êtes à présent le roi, et moi votre petite servante. Je vous prie de me retirer de la tour où je m'ennuie fort. »

 

Autre motif non moins familier : la princesse qui languit d’amour. Ainsi, de façon parfaitement contemporaine, dans une scène de promenade sylvestre d’Anguillette (1697), d’Henriette-Julie de Murat :

 

La jeune Hébé se promenait souvent dans ce bois solitaire ; un jour qu'elle sentait redoubler dans son cœur un ennui et une langueur qui ne la quittaient plus guère, elle voulut en chercher la cause, elle s'assit sur un gazon au bord d'un ruisseau dont le bruit entretenait sa rêverie. « Quel chagrin, disait-elle en elle-même, vient troubler l'excès de ma félicité ? Quelle princesse dans tout l'univers jouit d'un bonheur aussi parfait que le mien ? J'ai par les bontés de la fée tout ce que j'ai souhaité, je puis combler de biens tout ce qui m'environne, tout ce que je vois m'adore, et mon cœur ne connaît que des sentiments tranquilles ; non, je ne saurais imaginer d'où vient l'insupportable ennui qui s'oppose depuis quelque temps au bonheur de ma vie. »

 

Cet ennui accablant, les Princes en souffrent eux aussi quand ils sont séparés de celle qui les a charmés, comme, chez Perrault, dans Grisélidis et, plus encore, dans Peau d’Âne, où le Prince a tous les symptômes de la mélancolie :

 

Le souvenir de sa tendre aventure

Avec plaisir le conduisit chez lui.

Mais dès le lendemain il sentit sa blessure,

Et se vit accablé de tristesse et d'ennui. (Perrault, Grisélidis)

 

Dans le Palais, pensif il se retire,
Et là, nuit et jour il soupire ;
Il ne veut plus aller au Bal
Quoiqu’on soit dans le Carnaval.
Il hait la Chasse, il hait la Comédie,
Il n’a plus d’appétit, tout lui fait mal au cœur,
Et le fond de sa maladie
Est une triste et mortelle langueur. (Perrault, Peau d’Âne)

 

            C’est toutefois d’une autre tradition de contes qu’il faut bien sûr aussi faire mention : les contes orientaux, tant sont nombreux les Princes ennuyés inspirés de près ou de loin du sultan des Mille et une nuits. Tout le propos de Shéhérazade est de retarder de jour en jour son exécution en employant son génie de conteuse à dissiper l’ennui du sultan. Aussi, à la faveur du succès de la traduction de Galland (1704), des auteurs se sont-ils plu à camper des personnages de sultan désœuvré. Tel est le cas, au début des Bijoux Indiscrets, de Mangogul, dont Diderot imagine la maussade conversation avec sa maîtresse :

 

Le sultan dit en bâillant à plusieurs reprises : « Il faut avouer que Géliote a chanté comme un ange... - Et que Votre Hautesse s'ennuie à périr, ajouta la favorite. - Non, madame, reprit Mangogul en bâillant à demi ; le moment où l'on vous voit n'est jamais celui de l'ennui. - Il ne tenait qu'à vous que cela fût galant, répliqua Mirzoza ; mais vous rêvez, vous êtes distrait, vous bâillez. Prince, qu'avez-vous ? » (Pléiade, p. 9).

 

Le stéréotype de la mollesse orientale aidant, le sultan las de tout devient une figure récurrente. Au début de son conte « Soliman II » (1756), Marmontel, corrélant abondance de plaisirs et mélancolie, écrit ainsi : « Soliman s’ennuyait au milieu de sa gloire : les plaisirs variés, mais faciles du sérail lui devenaient insipides ». Dans Le Sopha de Crébillon (1737) on trouvait une formulation très voisine : « malgré de si grandes occupations, et des plaisirs aussi variés, il fut impossible au sultan d’éviter l’ennui ». Or, c’est avec une ironie évidente qu’est peint le sultan du Sopha : despote sot et imbu de lui-même, il est – à l’inverse de la Sultane – une incarnation du mauvais auditeur et du mauvais lecteur, friand de détails savoureux mais rétif aux réflexions :

 

Je soutiens, moi, que j’aime les contes, et qu’au surplus je ne les trouve plaisants que quand ils sont ce qu’on appelle entre gens sensés, un peu gaillards. [...] Je pensais que pour rendre les jours moins longs, il faudrait que chacun de nous racontât des histoires; quand je dis des histoires, je m’entends bien ! Je veux des événements singuliers, des fées, des talismans; car ne vous y trompez pas, au moins, il n’y a que cela de vrai.

           

Ce tyran de pacotille qui s’autoproclame petit-fils de Shéhérazade est une caricature du Sultan des Mille et une nuits. Pour clore cette étude, ce sont deux autres variations parodiques autour de la figure du Prince ennuyé – si souvent campée avec des accents tragiques – que nous évoquerons.

          Chez Diderot (non plus celui des Bijoux, mais du Neveu de Rameau), le financier Bertin est, dans un portrait satirique virtuose, décrit comme un morose détenteur du pouvoir en même temps – moyennant une vision mécaniciste du corps – que comme un ridicule automate :

 

Imaginez un mélancolique et maussade personnage, dévoré de vapeurs, enveloppé dans deux ou trois tours de robe de chambre ; qui se plaît à lui-même, à qui tout déplaît ; qu’on fait à peine sourire, en se disloquant le corps et l’esprit, en cent manières diverses ; qui considère froidement les grimaces plaisantes de mon visage, et celles de mon jugement qui sont plus plaisantes encore ; car entre nous, ce père Noël, ce vilain bénédictin si renommé pour les grimaces ; malgré ses succès à la Cour, n’est, sans me vanter ni lui non plus, à comparaison de moi, qu’un polichinelle de bois. J’ai beau me tourmenter pour atteindre au sublime des Petites-Maisons, rien n’y fait. Rira-t-il ? ne rira-t-il pas ? Voilà ce que je suis forcé de me dire au milieu de mes contorsions ; et vous pouvez juger combien cette incertitude nuit au talent. Mon hypocondre, la tête renfoncée dans un bonnet de nuit qui lui couvre les yeux, a l’air d’une pagode immobile à laquelle on aurait attaché un fil au menton, d’où il descendrait jusque sous son fauteuil. On attend que le fil se tire, et il ne se tire point ; ou s’il arrive que la mâchoire s’entrouvre, c’est pour articuler un mot désolant, un mot qui vous apprend que vous n’avez point été aperçu, et que toutes vos singeries sont perdues ; ce mot est la réponse à une question que vous lui aurez faite il y a quatre jours ; ce mot dit, le ressort mastoïde se détend et la mâchoire se referme... (Livre de poche, p. 94-95)

 

Jean Starobinski (Un diable de ramage, Gallimard, p. 168-169) a bien souligné combien Diderot met à mal le rituel ancestral du Prince diverti par le fou, le médiocre Bertin n’ayant d’ascendant qu’économique, et la bourgeoise robe de chambre se substituant au manteau royal. Le Neveu, qui se décrit ailleurs comme « un pauvre diable de fou » (p. 55) et déclare : « il n’y a pas de meilleur rôle auprès des grands que celui de fou » (p. 112), est certes un bouffon des temps modernes, qui maîtrise le corps et l’art de la contorsion, brille par sa maestria verbale, met à nu les simagrées sociales. Les singeries virtuoses de « Rameau le fou » ne suffisent toutefois pas à arracher un sourire au maître, dont il guette les décevantes réactions (l’alternative « rira-t-il, ne rira-t-il pas ? » peut faire songer à la conclusion de l’œuvre : « rira bien qui rira le dernier »).

            Au XXe siècle, parmi les auteurs qui ont réinterprété parodiquement le couple du roi ennuyé et du bouffon, figure le Beckett de Fin de Partie. Les relations entre Hamm et Clov relèvent de différents paradigmes : père et fils, maître et domestique, mais aussi, en filigrane, roi et bouffon. Hamm, qui déclare, en un décalque burleque de Shakespeare : « mon royaume pour un boueux », est assis sur son fauteuil comme sur un trône, exige d’être au centre (spatialement et symboliquement) et adopte dans son « roman » un ethos héroï-comique de grand seigneur miséricordieux. Dans l’inlassable partie d’échecs qui se joue entre les personnages (« à moi de jouer » est la première réplique de Hamm), Hamm serait le roi et Clov le fou : Beckett n’a-t-il pas dit de son personnage qu’il est « un roi dans cette partie d’échecs perdue depuis le début » ? Or, loin d’être « heureux comme un roi » (Nagg emploie l’expression), Hamm est un roi déchu. Aveugle, dépendant de Clov, il ne règne que sur une maison qui « pue le cadavre » et vit dans un complet désœuvrement. Pour fuir l’ennui, il se berce de rêves d’évasion (« allons-nous en tous les deux vers le Sud ! »), vite brisés par les répliques prosaïques de Clov, et il invente un « roman », quitte à singer la figure du créateur inspiré. La fiction serait-elle un des seuls fragiles remèdes à l’ennui ? Beckett a pu songer à Pascal, tant certaines considérations de Hamm sur l’homme perdu dans le néant (« l’infini du vide sera autour de toi [...], tu y seras comme un petit gravier au milieu de la steppe ») ont des résonances pascaliennes. « Un sketch de Pascal traité par les frères Fratellini », disait Anouilh d’En attendant Godot. Dans Fin de Partie, la figure du « roi sans divertissement » connaît un travestissement comique, mais ce détournement burlesque n’est pas, tant rire et désespoir sont réversibles chez Beckett, sans en accroître les virtualités tragiques. 

 

 

Nicolas Fréry

Mis en ligne le 04/06/2019

 

Fond d’écran : El Principe don Carlos de Viana, José Moreno Carbonero, 1881, Museo del Prado

 

 

 



[1] Le dialogue de Poins et du Prince Henry est cité au seuil d’une étude d’Auerbach intitulée « Le Prince fatigué » (Mimésis, Gallimard, « Tel », 1968, p. 314-338), qui malgré son titre ne porte pas sur l’ennui princier. 

[2] Voir aussi un paragraphe du fragment Sel. 167 : « quelque condition qu’on se figure, où l’on assemble tous les biens qui peuvent nous appartenir, la royauté est le plus beau poste du monde. [...] ».

[3] Voir entre autres le début de « Disproportion de l’homme » (Sel. 230) : « que l’homme contemple donc la nature entière... »

[4] Cf. Sel. 149 et 150 : « ce sont misères de grand seigneur, misères d’un roi dépossédé » ; « car qui se trouve malheureux de n’être pas roi sinon un roi dépossédé ».

[5] Revue Giono, n°11, 2018, p. 235-249.

[6] Cité par Philippe Arnaud, ibid., p. 247.